Colloque International Charlotte Delbo (1913-1985) Engagements, univers concentrationnaire, oeuvre.

Colloque international

Charlotte Delbo (1913-1985)

Engagement, univers concentrationnaire, oeuvre

1er mars 2013 : Bibliothèque nationale de France

2 mars 2013 : Comédie-Française

organisé par

La Bibliothèque nationale de France, L’Université Rennes 2, L’association Les Amis de Charlotte Delbo, L’institut d’Histoire Contemporaine de la Résistance, Bergame, Italie,

en partenariat avec la Comédie-Française

Président d’honneur : Rithy Panh

Comité scientifique (ordre alphabétique)

David Caron (Professeur des universités, Université du Michigan, USA) Joël Huthwohl (Directeur du département des Arts du spectacle, BnF, France) Christiane Page (Professeur des universités, Laboratoire théâtre, Université Rennes 2, EA 3208, France) Claude-Alice Peyrottes (Présidente de l’Association Les Amis de Charlotte Delbo, Metteur en scène, codirectrice de la Compagnie Bagages de Sable, France) Claudine Riera Collet (Ayant-droit de l’auteure, Elisabetta Ruffini (Directrice de l’Institut d’Histoire Contemporaine de la Résistance, Bergame, Italie) Nicole Thatcher (Chercheure invitée, Université de Westminster, Grande Bretagne) Annette Wieviorka (Directrice de recherche au CNRS – IRICE-Paris1, France)

Ce colloque est à l’initiative de Claudine Riera Collet, ayant-droit et légataire universel de Charlotte Delbo, dans le cadre des manifestations prévues pour le centenaire de la naissance de l’auteure mis au nombre des commémorations nationales 2013 par le Haut Comité des Commémorations Nationales (Ministère de la Culture et de la communication)

Secrétaire de Louis Jouvet, puis résistante, Charlotte Delbo est déportée à Auschwitz (1943) et parle poésie, littérature et théâtre à ses compagnes de captivité, car « le plus grand recours, c’est de parler. C’est ça qui sauve » (Madeleine Chapsal, L’Express, 1966). À son retour elle continue son travail avec les mots : « Pourquoi j’ai écrit sur Auschwitz : pour porter à la connaissance, pour porter à la conscience. L’évènement – l’histoire – n’entrent dans la mémoire de l’humanité que s’ils sont portés à la connaissance, c’est à dire à la conscience. Porter à la conscience, c’est porter au langage. Porter au langage ne signifie pas simplement : mettre en écrit. Porter au langage, cela veut dire se servir du langage, des mots que savent les autres, pour leur communiquer émotion, sentiment, expérience vécue – ou imaginée -, vérité. » (Charlotte Delbo, Extrait d’un communiqué, Université de New York, 10 octobre 1972 après la lecture de « Spectres, mes fidèles »).

Son oeuvre poétique et dramatique, enfin reconnue, interroge désormais les chercheurs comme les artistes (elle est, pour le réalisateur Rithy Panh, une référence essentielle, et nombreux sont les metteurs en scène qui montent ses textes poétiques ou dramatiques).

Elle ne cherche pas à établir un savoir sur les camps d’extermination nazis mais à communiquer la vérité d’un vécu inimaginable, non partagé par la majorité de ses lectrices et lecteurs. Elle a recours à la poésie car, « seul le langage de la poésie permet de donner à voir et à sentir » (Entretien de Claude Prévost avec Charlotte Delbo, « La déportation dans la littérature et l’art », La Nouvelle Critique, juin 1965, No 167, p. 42). Dans la trilogie Auschwitz et après et dans La Mémoire et les jours, ce langage prend forme dans une combinaison de prose poétique et de vers libres qui présente une disposition spatiale traduisant les silences et les effets de résonance dans un rythme qui s’accorde aux mouvements des corps souffrants.

Bien que la re-présentation théâtrale de la déportation (étymologiquement la possibilité de re-présenter ce qui a déjà eu lieu), semble impossible, du fait de l’inadéquation entre un univers qui anéantit l’homme et la forme théâtrale, Charlotte Delbo s’est aussi tournée vers la forme dramatique pour rendre compte de son expérience d’Auschwitz et dénoncer toutes les formes d’oppression : engagée à gauche, elle a écrit sur la guerre d’Algérie, le goulag, la dictature argentine, le procès de Burgos, la Révolution des oeillets au Portugal, mai 68. Les procédés d’écriture qu’elle utilise font de son oeuvre non seulement un témoin d’un moment de l’histoire où le malaise dans la civilisation devient synonyme de catastrophe, mais aussi une recherche qui se situe entre éthique et esthétique et questionne le passé en relation avec le présent à partir de voix féminines, multipliant la sienne et sonnant comme un avertissement. Son travail littéraire et sa dramaturgie ouvrent sur plusieurs problématiques qui ont à faire avec le traitement contemporain de la mémoire par l’écriture et sur scène, et de nombreux lecteurs et spectateurs témoignent du choc émotionnel provoqué par leur rencontre avec l’oeuvre.

Ce colloque se veut interdisciplinaire par le choix, d’une part, de ne pas cloisonner les différents écrits de Charlotte Delbo dans des cases académiques préétablies et d’autre part par la volonté d’être ouvert à des chercheurs de différentes disciplines.

Trois grands axes de réflexion sont proposés, qu’illustrent ces phrases de Charlotte Delbo :

Témoignage et transmission : « Chacun témoigne avec ses armes … je considère le langage de la poésie comme le plus efficace — car il ramène le lecteur au secret de lui-même — et le plus dangereux pour les ennemis qu’il combat. […] Je pose aux lecteurs et aux spectateurs une question : qu’avez-vous fait, que faites-vous de votre vie ? Qu’ils éprouvent l’envie de chercher une réponse me donnerait le sentiment de ne pas écrire en vain. Je n’écrirais pas si cela me paraissait inutile » (« Entretien avec Charlotte Delbo » propos recueillis par François Bott Le Monde des livres, 20 juin 1975, p. 15.

Poésie, littérature, théâtre : « Pourquoi, soudain, ce que j’écris revêt la forme d’un poème ? Pourquoi soudain, je vois un personnage se dessiner et se mouvoir ? Je ne sais pas. […] Chez moi, c’est le sujet qui impose la forme ».

L’engagement : « N’y a-t-il pas toujours eu des raisons de s’indigner ? » (Charlotte Delbo, Les Belles lettres,

Éditions de Minuit, 1961/2012.

« Écrire est un acte qui engage tout l’être. C’est un acte grave, dangereux. Il y faut du courage. On y risque parfois sa vie et sa liberté (qu’on songe aux écrivains dans les régimes totalitaires), toujours sa réputation, son nom, sa conviction, sa tranquillité, quelquefois sa situation, souvent ses amitiés. On met en jeu sa sensibilité, ce qu’il y a de plus profond en soi. On s’arrache la peau. On se met à vif. » Charlotte Delbo, « Chronique », Le Monde, 11 Septembre 1981

1er mars

Lieu : Petit Auditorium de la BNF/François Mitterrand

9h 30. Accueil des participants.

9h45. Ouverture par Jacqueline SANSON, directrice générale de la BnF.

Lecture d’un texte, de Charlotte DELBO par Claudine RIERA-COLLET ayant droit de Charlotte DELBO.

Présentation du colloque par Christiane PAGE, professeur des universités (Rennes 2).

Première séquence : Présidence de séance Nicole THATCHER

10h. STUPAR Mileva, « Les archives de Charlotte DELBO, reflets d’une vie ».

10 h 20. MARQUART Sharon, « Entre silence et reconnaissance : De l’engagement humanitaire chez Charlotte DELBO. »

10 h 40. GRADWOHL Paul, « Charlotte DELBO et le communisme, Charlotte DELBO et les communistes. »

11 h 00. Discussion.

11h 15. Pause.

11 h 45. Table ronde : « Charlotte Delbo : son rapport à l’art et à sa propre oeuvre artistique ». Médiatrice Elisabetta RUFFINI

Intervenants : Claudine Riera Collet (Ayant-droit et amie de Charlotte Delbo), Ghislaine Dunan (oeuvre littéraire),

François Veilhan (musique), Alain Kremski (musique), Yves Thouvenel (l’oralité et mise en voix de l’oeuvre de Charlotte Delbo).

12h30 : Pause repas.

Deuxième séquence : Présidence de séance Elisabetta RUFFINI

14 h 00. CORBEL Laurence, « Le statut du témoignage dans Auschwitz et après : vérité, véridicité et fiction. »

14 h 20. SARACZYNSKA Maja, « Le témoignage de Charlotte DELBO en quête d’une forme adéquate. »

14h 40. CLOSSON Marianne, « Représenter pour penser : enjeux politiques, éthiques et esthétiques dans l’oeuvre théâtrale de Charlotte DELBO. »

15 h 00 : Discussion.

15 h15 : Edith SCOB : Lectures d’extraits de Spectres mes compagnons.

15 h 30 : Pause repas.

Troisième séquence : Présidence de séance David CARON

16 h. BODY Jacques, « L’Empreinte de GIRAUDOUX dans la vie, dans l’oeuvre et dans la pensée de Charlotte DELBO. »

16h 20. AUGEREAU Flore, « Louis Jouvet, un maître pour Charlotte DELBO ? »

16 h 40. CHIAPPONE Magali, « La respiration de Charlotte DELBO et le souffle de Louis Jouvet. »

17 h : Discussion de clôture de la journée

17 h 30. Projection du Film documentaire : « L’histoire du convoi du 24 Janvier 1943- Auschwitz-Birkenau » de Claude Alice PEYROTTES et Alain CHERAFT (50 mn).

Conclusion du premier jour Rithy PAHN (sous réserve)

2 mars

Lieu : Studio-Théâtre de la Comédie-Française

9 h. Accueil des participants

9 h 15. Ouverture de la journée par Muriel MAYETTE et Christiane PAGE

Première séquence : Présidence de séance Christiane PAGE

9 h 30. BRODZIAK Sylvie, « Florilège épistolaire et engagement pendant la guerre d’Algérie : Les Belles Lettres de Charlotte DELBO. »

9h 50. PARRAU Alain, « Charlotte DELBO et Hanna LEVY-HASS : l’expérience des camps et la question de la communauté. »

10 h 10. FROLOFF Nathalie, « Ce poète qui nous avait promis des roses. »

10h 30. Discussion.

10 h 45. Pause.

11 h 15. Table ronde, « Interpréter l’histoire : témoignage historique / création et interprétation ». Médiatrice Annette

WIEVIORKA

Intervenants : François Bott, Claude-Alice Peyrottes, Catherine Coquio et Judith Lyon-Caen.

12h30 Pause repas

Deuxième séquence : Présidence de séance Joël HUTHWOHL

14 h 00. MARTEAU Frédéric, « Regarder, voir, savoir – Enjeux du regard et poétique de la lecture dans l’oeuvre de Charlotte DELBO »

14 h 20. NATOLI Alexandra, « Essayez de regarder. Essayez pour voir : » Transmission et rapportage à travers le corps humain et les fonctions corporelles dans Qui rapportera ces paroles ?, et Aucun de nous ne reviendra »

14h40. KORETSKY Carolina, « Du cauchemar concentrationnaire au rêve collectif. »

15 h. Discussion.

15 h15 Pause

15h30. BRUNETAUX Audrey, « Images-déchirures et monstration: l’écriture photographique de Charlotte DELBO. »

15h 50. BERNARD-NOURAUD Paul, « Parler du passé comme s’il était présent ». Déploiements de l’espace-temps du témoignage chez Charlotte DELBO au travers de ses hypotyposes. »

16h10 Discussion

16h30 Conclusion : « Charlotte Delbo, Une littérature de la conscience »1 Extraits d’entretiens filmés avec des proches de Charlotte DELBO (20 mn), Claude-Alice PEYROTTES. (Sous réserve)

1. Rosette Lamont, critique de théâtre, auteur, professeur de littérature française et comparée aux USA, et amie de Charlotte Delbo.

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